Les marques dans le coup se concentreront sur les utilisateurs. Pas sur les acheteurs !

Alors que le numérique prend une place toujours plus importante dans la vie des consommateurs (avec déjà plus de 10% du commerce mondial réalisé par le e-commerce), les marques se posent la question du positionnement à adopter pour ne pas être dépassées…

La Harvard Business Review rapporte les enseignements d’une étude pour SAP et Shift Thinking qui devraient intéresser tous les entrepreneurs et en particulier notre secteur de l’abonnement. Dans notre époque qui suit l’explosion d’internet, l’étude observe que les marques digitales ne se contentent pas de faire les choses différemment… Elles pensent différemment leur approche client. 5000 clients américains ont été interrogés par l’étude et 50 marques sont étudiées, tant des traditionnelles que digitales.

Les entreprises d’autrefois positionnaient leurs marques en ayant en tête les consommateurs. Les marques digitales, elles, semblent se concentrer plus spécifiquement sur la vie des clients. Plus précisément, elles considèrent désormais ces derniers comme des utilisateurs plus que des acheteurs. De cette observation découlent des approches tout à fait différentes dans la commercialisation des produits des marques digitales, tant dans la promotion permettant de faire connaître les produits de la marque, que dans l’optique d’un renouvellement, ou dans la construction de la légitimité de la marque à entrer dans la vie du consommateur.

Voici quelques exemples dans 3 secteurs différents. A gauche la marque digitale étudiée, à droite la marque déjà bien établie, et entre parenthèses le secteur d’activité.

  • Airbnb / Hilton (hôtellerie)
  • Red Bull / Coca-Cola (sodas)
  • Tesla / BMW (automobile)

Les marques digitales sont perçues différemment par les clients. Alors que les marques traditionnelles ont une légitimité surtout apportée par la publicité et relayée dans les médias traditionnels, les marques digitales se sont distinguées car elles sont plus souvent découvertes à travers les réseaux sociaux, internet ou directement par le bouche à oreille.

Ainsi, selon l’étude, une nouvelle classification distingue les « purchase brands » (marques que l’on achète) des « usage brands » (marques que l’on utilise). Cette nouvelle dichotomie permet de classifier les marques et d’observer les différences suivantes :

Les purchase brands concentrent leur communication pour créer de la demande.

Demande susceptible d’acheter le produit de la marque. Par exemple, les grands magasins comme les Galeries Lafayette, établies depuis longtemps, vont distribuer des échantillons ou proposer un séance de maquillage pro offerte sur place pour convaincre les clientes de repartir avec un des nombreux produits cosmétiques proposés au rez de chaussée. En revanche, de nouveaux entrants comme Sephora ou Kiko Makeup vont davantage miser sur le conseil, la communauté en ligne et les services d’aide pour que la cliente apprécie vraiment utiliser le maquillage chez elle.

Les purchases brands vont se concentrer (à tort ?) sur les promotions, quitte à rogner les marges.

Dans cette optique, elles établissent un calendrier des opérations (plans média, stratégie marketing annuelle etc.). Alors que les usage bands vont de leur côté se concentrer sur les recommandations entre clients. Aux Etats-Unis, les anciennes stations de ski vont promouvoir le nombre toujours plus important de pistes, l’étendue du domaine skiable ou proposer des promotions sur les remontées. Mais de nouveaux acteurs comme Vail Resorts et son programme marketing EpicMix bousculent le marché en proposant un réseau social fermé qui se concentrera sur la gamification, le suivi des performances entre utilisateurs de la station et les photos que l’on peut partager avec ses amis.

Les équipes marketing des purchase brands se concentrent sur ce qu’elles doivent dire aux clients avant qu’il n’achète.

Celles des usage brands s’inquiètent de ce que les clients vont dire entre eux de la marque. Par exemple, Airbnb met plus en avant les commentaires des clients que n’importe quelle chaîne hôtelière classique (comme les hôtels Hilton, bien établis, par exemple).

Enfin, les purchase brands se concentrent sur ce que les clients pensent de la marque jusqu’au passage en caisse…

… alors que les usage brands façonnent la façon dont les gens perçoivent la marque tout au long du processus et au-delà de l’achat. Le bon exemple ici est l’Apple Store. Là où dans un magasin traditionnel, le consommateur prend ses articles puis se rend en caisse, dans ces magasins d’un nouveau genre vous êtes pris en charge au milieu du magasin. C’est parmi les produits que le personnel de la marque vous guide, jusqu’au Genius Bar où l’on se proposera de résoudre votre problématique et bien sûr, de vous vendre le produit ou la solution adaptée à votre besoin informatique si nécessaire. Si une réparation est préférable, on ne vous force pas la main pour un nouvel achat. Malgré les prix élevés de la marque, votre expérience est primordiale pour eux.

L’étude conclut sur l’importance que les dirigeants doivent désormais accorder à cette dichotomie entre usage et achat.

Les marques souhaitant tirer tout le potentiel des nouvelles technologies doivent absolument s’assurer qu’elles ont entamé cette transition et qu’elles pensent désormais l’engagement envers leurs clients en les considérant en tant qu’utilisateurs, plus comme des consommateurs ou de simples « acheteurs ». Là où les marques cherchaient autrefois à différencier la perception qu’avaient les clients de leurs produits dans l’espoir de convaincre de nouveaux acheteurs, les marques d’usage vont chercher à améliorer coûte que coûte leurs produits et SAV pour rendre la vie des consommateurs plus facile et avoir plus d’adeptes. Le contenu de marque devient alors primordial, plus encore que les promotions ou la publicité. Le contenu doit être utile au client et relater l’expérience que la marque peut procurer. Le client peut ainsi être heureux de connaitre la marque à travers son site, ses conseils ou ses tutoriels vidéo, même s’il n’a pas encore dépensé un centime. Et l’étude prouve que les clients sont prêts à payer davantage par la suite pour continuer à bénéficier de cette expérience. Pour résumer, un chef d’entreprise focalisé sur les usages plutôt que sur les achats préfèrera voir ses équipes accumuler des avis 5 étoiles sur Google que d’obtenir une victoire à Cannes pour son dernier spot de publicité TV !

Pour les grandes marques, la transition de « purchase » à « usage » peut être complexe. Elle implique de reconcevoir la stratégie, certains investissements, l’organisation des équipes et la mesure des résultats (quels sont les indicateurs les plus importants à suivre désormais).

Toutefois, les marchands qui se sont lancés dans le business de la box ou qui gèrent déjà un service par abonnement sont – sans forcément l’avoir encore formulé – déjà confrontés à toutes ces problématiques. Pour réussir, le trafic reçu sur ces sites doit être pensé comme une communauté potentielle de futurs utilisateurs et / ou abonnés, plus que comme des prospects ou des acheteurs à convertir immédiatement.

Source : hbr.org